Alerte ! C’est tout le statut qui est visé !
Après l’évaluation selon le projet d’établissement mise en place par N. Vallaud-Belkacem, Blanquer veut que les enseignants soient recrutés par le chef d’établissement.
Alerte ! C’est tout le statut qui est visé !
Dans une interview donnée au Nouvel Observateur (édition du 23 au 30 août), Jean Michel Blanquer déclare : “Mon objectif est simple : des établissements avec des équipes unies, partageant un projet éducatif fort. Dans ce cadre, oui, il est logique que le chef d’établissement ait un rôle à jouer en matière de recrutement. (…) Les professeurs auraient tout à gagner à ces évolutions”.
C’est en totale cohérence avec l’idée développée dans son livre “L’école de demain”, publié en 2016 : “Il faut repenser les mécanismes d’affectation et de mouvement qui constituent l’un des freins majeurs à la transformation du système éducatif”, écrit-il.“Le recrutement sur profil pourrait être généralisé… comme c’est le cas dans l’enseignement privé”.
C’est aussi en totale cohérence avec la volonté affirmée de renforcer encore l’autonomie des établissements, sur les horaires, les programmes et les diplômes, la réforme annoncée du baccalauréat permet d’en faire un diplôme d’établissement.
Pour cela il faut aussi détricoter toutes les garanties statutaires des enseignants et faire du projet d’établissement ‑la loi locale- contre les droits et garanties nationales. Le droit à mutation, prévu par le statut de la fonction publique d’État dans cette logique est de trop !
Le recrutement sur la base du projet d’établissement et du profil n’est-il pas la suite logique de l’évaluation mise en place par la ministre précédente, prévue pour s’appliquer dès cette année scolaire ? La nouvelle grille d’évaluation fait l’impasse sur l’application des programmes nationaux, réduit à la portion congrue les contenus disciplinaires, mais accorde une importance décisive à la « diversité des élèves » et à des critères tels que « Coopérer à l’action de la communauté éducative et coopérer avec les parents d’élèves et les partenaires de l’école/l’établissement ».
C’est le projet d’établissement qui devient de fait le critère essentiel.
D’autres questions essentielles vont de pair. Les concours de recrutement, après validation du stage ouvrent droit à l’affectation sur un poste. Deviendront-ils autre chose qu’une habilitation à enseigner, à charge à l’enseignant de se faire recruter localement ?
Qui décidera de la paie et de l’avancement ? Va-t-on vers le salaire au mérite, comme évoqué pendant la campagne électorale par Emmanuel Macron ? D’ores et déjà l’évaluation Vallaud-Belkacem a un poids décisif dans l’attribution des réductions d’ancienneté pour un avancement accéléré, et la mise en place de la classe exceptionnelle ouvre la voie à une fonction publique d’emploi.
Un tel système ne passe-t-il pas par la mise en place d’une direction élargie, d’une hiérarchie intermédiaire dans le corps enseignant ? Mais la mise en place des indemnités pour missions particulières (IMP) et de coordonnateurs divers par madame Vallaud-Belkacem n’en est-il pas un avant goût ?
Dans le premier degré un tel système ne passe-t-il pas par la mise en place d’établissements publics d’enseignement primaire ou par circonscription avec les collèges, sur le modèle de l’école du socle commun de la loi de refondation de l’école ?
Les obligations de service ne devraient-elles pas être complètement annualisées pour être déclinées localement ? Le décret Hamon sur les obligations de service des enseignants du second degré et celui sur celle des remplaçants dans le premier degré n’ouvrent-ils pas la porte ?
JM Blanquer veut aller jusqu’au bout : c’est ce qu’il écrit dans son livre. JM Blanquer fustige l’égalitarisme pour mieux combattre l’égalité républicaine, celle des droits. La concurrence devient la règle, « régulée » par des audits d’établissement et des évaluations diverses.
Les projets du ministre de l’Education nationale et le projet de loi Travail XXL s’inscrivent dans une même logique. D’un côté, l’autonomie renforcée des établissements et le projet d’établissement qui s’impose dans tous les domaines ; de l’autre, l’accord d’entreprise supplantant la loi et l’accord de branche, le conseil d’entreprise fusionnant les instances de représentation des personnels (Comité d’entreprise, DP, CHSCT) pour associer les syndicats aux décisions du patron.
Pour préserver nos droits et garanties et celles de tous les salariés, une seule et même réponse sont à l’ordre du jour : préparer le rapport de force.